13 septembre 2011

Turqueries en vrac


Quatre mois en Turquie déjà! Je commence à me sentir un peu plus Turc que Canadien. Mon vocabulaire turc s'améliore rapidement, dû aux leçons particulières et intimes de Deniz : on apprend vite avec la tête sur l'oreiller...
Je commence aussi à avoir saisi certaines façons de faire typiquement Turc. Ici, la notion de protection du consommateur est inexistante. On va vous vendre absolument tout ce que vous voulez, mais assurez-vous d'avoir exactement ce dont vous avez besoin parce qu'une fois que vous avez payé, impossible de se faire rembourser. Même, que dis-je, surtout avec les grandes entreprises. J'ai chèrement payé ma première expérience téléphonique avec VODAFONE. 
Tout a mal commencé quand ce « gentil » Turc m'a proposé de « m'aider » au moment ou je suis entré en Turquie, à Iskenderun en avril. Bien qu'il ait réussi à m'obtenir une carte SIM avec connexion internet sans avoir besoin de mon passeport, ça n'a pas duré longtemps. Même après avoir expliqué en long et en large aux différents préposés, gérants et autre personnel incompétent, avec l'assistance d'autres amis Turcs vraiment bienveillant ceux-là, j'ai bien faillit perdre mon sang froid dans une boutique VODAFONE de Izmir. Sur le point de faire intervenir la police pour escroquerie, j'ai soudainement repris connaissance en me disant que ma sérénité valait bien les £200 TL que j'avais déjà dépensé chez eux jusqu'à présent. VODAFONE est une grosse multinationale de la téléphonie britannique qui me rappelle étrangement une Bell du Canada. À cause du terrorisme potentiel les autorités turques sont hyper procédurières en ce qui concerne la téléphonie. J'ai donc refilé ma carte SIM VODAFONE acquise par « l'ami » d'Iskenderun, à un type très louche rencontré dans les bas fonds d'Istanbul en lui souhaitant de grands succès dans toutes ses entreprises! 
Technique de remorquage Turc
Vous vous demandez sans doute ce que je faisais dans les bas fonds d'Istanbul? Et bien figurez-vous qu'après avoir garé ma Marseillaise à côté de dix autres motos sur Taksim square, grande place au bout de la rue piétonnière Istiklal, et être allé savourer un succulent repas en compagnie de mon amoureuse, j'ai trouvé la grande place vidée de tout ce qui avait deux roues. Après avoir demandé aux patibulaires policiers, « éffouèrés » dans une quatre roues sur la même grande place, ce qu'il était advenu de ma distinguée française déguisée en allemande, j'ai appris qu'elle était en téléportation vers une vulgaire fourrière. J'ai eu beau insister qu'il n'y avait pas de panneau interdisant cette pratique du stationnement sauvage, on m'a répondu avec un immense sourire « C'est ça la Turquie! ». La-dite fourrière était sise dans un quartier malfamé et nous y arrivâmes au moment même ou le technicien de la remorqueuse la tenait suspendue au bout d'un bras articulé et s'apprêtait à la déposer parterre. M'en suis tiré pour £75 TL. Ça compensait pour toutes les fois ou je pratique le stationnement sauvage (n'importe quel trottoir ou espace pas nécessairement prévu à cet effet).
En plein coeur de la Turquie
En Turquie on mange Turc. Vous me direz « Ça va de soi! », mais je veux dire qu'on mange ce qui pousse ici, ce qui vit ici, ce qui est produit ici. Mis à part quelques rares petits produits importés, on trouve très peu d'aliments provenants d'autres pays sur les tablettes des marchés, sauf bien sûr si on va dans un méga supermarché. 
Le meilleur petit-déjeuner!
Même chose du côté restauration : on trouve bien de temps en temps un resto italien qui parvient à survivre mais LE resto chinois d'Ankara n'en avait que l'apparence, jusqu'aux serveurs qui étaient assez typiquement turcs, c'est tout juste s'ils ne portaient pas le fez. Les sushis sont « trendy », mais rares, très rares, et exorbitants. Même dans les grandes et grosses surfaces les fruits et légumes se limitent à la production locale. Les Camenbert et Brie français y sont introuvables! Par contre, elle est extraordinaire cette production locale! Du thé, des oranges, des abricots, à peu près toutes les sortes de noix imaginables, la variété du climat et de la géographie sont telles qu'ils arrivent à faire pousser à peu près n'importe quoi. L'ouest turc génère les trois quarts de l'huile d'olive « Grec » que vous achetez, par le même procédé que l'huile italienne qui provient de la Tunisie. Le yogourt se décline ici dans une multitude de textures et de saveurs toutes aussi délectables les unes que les autres, servit à toutes les sauces, ou nature selon votre degré de gourmandise. Question gourmandise, ceux d'entre vous qui ont la dent sucrée seraient subjugués par la panoplie de baklava qui se pavanent dans les vitrines, lequel, soit dit en passant, serait une création Turque et non pas Grec, mais ce débat-ci dure depuis des temps immémoriaux ...

Nous nous apprêtons donc à quitter Ankara, et la Turquie ensuite, pour traverser les pays des Balkans et nous rendre jusqu'à Graz, en Autriche, là où nous nous installerons pour passer l'hiver qui vient. 

J'ai parfois un peu l'impression de quitter encore la « maison » tellement j'ai passé de temps ici, tellement je m'y suis senti chez moi, accueillit comme nul part ailleurs. J'ai comme l'idée que j'y reviendrai encore et encore dans ce pays totalement envoûtant. N'est-ce pas ici que toutes les routes se croisent, que l'occident frôle l'orient, séparé seulment par un étroit canal ? Que les cultures s'entrecroisent depuis la nuit des temps?
L'appel à la prière du matin qui résonne à travers toutes les villes ne me réveille plus, le thé, pris à tout moment, est devenu un essentiel de mon quotidien, et j'ai même la sensation que c'est mon père qui prend soin de moi quand le moustachu d'office me fait le kese et le massage au hammam hebdomadaire.
C'est sans doute signe qu'il est temps pour moi de reprendre la route ... et d'aller voir de quoi sont fait ses autrichiens, qui ont aussi eu leur moment de gloire avec Sissi, l'impératrice qui y a toujours un palais.
Auf Wiedersehen