08 juillet 2013

Au revoir l'Asie! Bonjour l'Amérique!

Les plantations entre Jakarta et Bandung
Leo nous avait donné rendez-vous dans un village sur la route entre Jakarta et Bandung. Avant de partir de Jakarta, Momon avait pris soin de nous tracer un itinéraire « panoramique », en tentant de nous faire éviter les endroits où le trafic était plus intense. Peine perdue, le trafic est intense partout en Indonésie. On a bien traversé des montagnes parsemées de villages et de plantations de thé magnifiques, mais sitôt arrivé dans une agglomération importante, la densité de la circulation étouffante nous rattrapait.
Leo et cie

Quand on s'est arrêté à la station d'essence du village où on avait rendez-vous, il s'est encore mis à pleuvoir dru. Leo est arrivé complètement trempé avec sa grosse BMW R100, un sourire contagieux collé dans la face. On a pris le temps de se restaurer un peu, permettant à la pluie de s'estomper tranquillement, avant de reprendre la route jusqu'à la résidence de Leo, dans les montagnes tout près de Bandung.
Deniz à l'oeuvre, près de la cuisine

Le système électrique de la moto de Deniz s'était remis à faire des siennes en quittant Jakarta et nous avions hâte d'arriver avant de tomber en panne, bien qu'en compagnie de Leo je m'inquiétais un peu moins : c'est un monsieur plein de ressources. Avec mon système de charge qui ne fonctionnait qu'à moitié, on avait comme un problème d'énergie qui circulait mal. Heureusement que Leo, sa femme Rika et leurs deux enfants étaient là et nous accueillaient à bras ouverts. Leur « maison » très confortable est très spécialement conçue : le rez-de-chaussé est une grande pièce ouverte consacrée aux motos et à la préparation d'expéditions, agrémentée d'un coin salon accueillant et de la cuisine réservée à Rika.
L'atelier dans le salon
Au deuxième, 2 chambres sommaires mais confortables, une salle de toilette et un coin télé, qu'on a jamais vu allumée. Le tout est une structure de bois recouvert de bambou, assis sur de la pierre cimentée d'un plus bel effet, situé à flanc de montagne avec vue sur la ville et le volcan au loin, traversé d'une rivière endiablée : décor enchanteur! Même si les réparations prenaient un peu de temps, ça ne nous embêtait pas du tout. 
Le coeur électrique de ma Marseillaise
Il a fallut trois jours pour que tout soit rentré dans l'ordre côté mécanique. Les journée ont passé doucement et les ennuis se réglaient de la même façon. Il fallait bien partir si on voulait un jour rejoindre Bali. Et il y avait encore tant à voir sur Java. Les communications ne fonctionnaient pour ainsi dire pas à la maison dans la montagne. Chaque visite en ville, 8 km plus bas, devenait une expédition planifiée. Une super batterie neuve pour Tesla, une bobine d'alternateur refaite complètement pour ma Marseillaise, et nous étions prêt à reprendre la route vers l'Est.
Avant de descendre dans le cratère de Bromo

Notre première étape, à Malang, était pour s'informer sur la meilleure route à prendre pour se rendre au volcan de Bromo. La « meilleure route » s'est avérée être aussi une extraordinaire aventure de moto. Ce qui avait débuté par une jolie route de campagne asphaltée, s'est transformé peu à peu en petite route cahoteuse de montagne pour se terminer en une randonnée surréaliste dans l'immense cratère de sable noir du volcan au repos. 
Elle est oû la route?

L'hôtel, simple et convenable, situé sur la frange du cratère, disposait encore d'une dernière chambre que nous nous sommes pressés d'accepté avec joie, trempés que nous étions par l'averse quotidienne de l'après-midi passé dans la brume qui s’engouffre au fond du cratère. Pour savourer vraiment la magie de ce lieu mystique, il faut se lever très tôt et grimper au sommet de la bouche du volcan pour y admirer le lever du soleil. 
La récompense des lève-tôt

L'avant-midi se prêtait donc très bien à la pratique follement amusante de la moto « hors pistes » : la mer de sable noir, bien trempée par la pluie, est vite devenue un immense terrain de jeu, idéal pour s'amuser comme des enfants dans le « grand carré de sable ». La pluie et le brouillard qui s'installe après le dîner, nous obligeait presque à la sieste, et nous n'avons pas résisté.
Deniz s'amuse un peu dans le grand carré de sable

Le climat frais et très humide qui prévaut là-haut, à 2500 mètres, contrastait agréablement d'avec la chaleur torride qui régnait une fois redescendu.
Pendant le trajet vers Yogyakarta, Leo avait contacté le chapitre local des « Biker's Brotherhood » et nous y étions attendu. Yogyakarta est une ville très « artistique », très particulière pour les Indonésiens. La cité intérieur du Sultan qui à résisté avec brio aux envahisseurs Deutch il y a longtemps, demeure encore aujourd'hui vivante et vibrante. 
Une jolie bande de motards qui vient de se lever

Wisnu est le patron d'une entreprise florissante qui remonte des Harley Davidson, et l’attentionné mari d'Érika, une des plus célèbres artistes peintres d'Indonésie. Elle fait de la peinture « naïve » et a un carnet de commande démesurés. C'est aussi une motocycliste et sa Harley est des plus originales, peinte de ses propres mains : un véritable chef d’œuvre. 
Le chef d'oeuvre d'Érika

Ces deux là étaient fait pour vivre ensemble. Pendant notre séjour à Yogyakarta, nous avons littéralement été pris en charge par cette communauté singulière qui gravite autour d'Érika et de Wisnu. Un petit essaim discret d'hommes et de femmes pourvoit à tous leurs besoins dans leurs nombreuses résidences dédiées aux différentes activités. Érika et Wisnu ont même délaissé leurs obligations pour se faire une randonnée en notre compagnie au temple de Borobudur et y prendre un copieux petit-déjeuner au lever du soleil. 
L'atelier de l'artiste en pleine production

Quelqu'un venait nous chercher à tous les soirs pour nous emmener partager le souper en leur compagnie. Il nous a fallu insister sur notre agenda pour quitter Yogyakarta, avec la promesse de garder contact.

Nous approchions maintenant de Bali. Patrick, que j'ai connu dans de sombres mais heureux sous-sols d'église, vit aujourd'hui à Bali avec sa conjointe indonésienne Ari. Ari travaille pour une prestigieuse agence de voyage balinaise. Ce sont eux qui nous ont aidé à obtenir un visa indonésien de 2 mois, et qui nous attendaient à Ubud, dans la magnifique résidence qu'ils louent depuis plus de 2 ans maintenant. 
Dans la bouche d'Ijen
Ari nous avait fortement suggéré et gentiment organisé un séjour au très chic « Ijen resort » sur Java, tout près du volcan du même nom, et à quelques kilomètres du traversier pour Bali. 
Les cueilleurs de souffre

Ébahi par tant de beautés nous avons décidé d'y passer 3 jours et nous avons gravi les 3 kilomètres pour se rendre jusque dans la bouche de se cracheur de feu assoupi mais encore très actif. Tout au long de l'ascension on croise un défilé incessant de porteurs de souffre qui puisent le minerais directement dans le fond du cratère et qui l'acheminent jusqu'en bas en le portant sur les épaules dans des paniers de fortune, le tout pour quelques misérables dollars par jour. Arrivé en haut, la vision est spectaculaire et dramatique.
Le jardin qui jouxte notre petite résidence chez Patrick et Ari

Ne nous restait plus qu'à traverser le petit bras d'océan qui sépare Java de Bali, et de poser nos béquilles de motos dans le paradis de Patrick et Ari pour s'offrir un grand repos bien mérité. Il nous restait 3 semaines de visa pour explorer l'île et organiser l'expédition des motos directement à Montréal, puisque malgré toutes nos tentatives et nos recherches il nous était impossible d'obtenir des assurances nous permettant de circuler sur le bitume nord-américain. Une véritable absurdité! Après avoir fait pratiquement le tour du monde sans problèmes, impossible de revenir à la maison sur nos montures. 
L'entrée d'un temple balinais

Sans compter qu'il nous fallait aussi faire la demande d'un visa canadien pour Deniz avant de se pointer aux douanes. Notre demande de résidence permanente nous a été retourné au bout de 35 jours avec une lettre nous avisant que nous avions utilisé une vieille version d'un certain formulaire, bien que nous avons téléchargé tous les formulaires sur le site d'immigration Canada. Un dossier à suivre.
L'entrée de l'oasis de Patrick et Ari

L'oasis que Patrick et Ari nous ont généreusement offert s'est avéré être exactement ce dont nous avions besoin. Après plus d'un mois de cacophonie indonésienne et de routes effrénées, démentielles, nous rêvions d'un coin vert et tranquille, et c'est très précisément ce que nous y avons trouvé. La jolie et confortable maison d'invité qui jouxte la résidence principale, a été notre havre de paix pendant notre séjour sur Bali. Patrick et Ari ont été des hôtes parfaits : attentionnés, discrets, accueillants et pleins de ressources aux moments opportuns. Encore une fois, la vie nous offrait plus que ce dont nous avions besoin.
Deniz et son activité préférée après la moto
Deniz en a profiter pour s'offrir l'ascension d'un autre volcan sur l'île voisine de Lombok et une escapade de quelques jours sur les petites îles Gili. De mon côté, j'ai mis ce temps à profit pour découvrir à moto les petites routes qui serpentes à travers les rizières autours d'Ubud, et me suis remis assidûment à la pratique yogique, l'endroit s'y prêtant tellement. Je devais aussi trouver un agent pour l'expédition des motos et organiser notre retour vers l'Amérique. Mais j'avoue que j'ai abusé, sans aucune culpabilité, du moment de paresse qui était mis à ma disposition sans préavis.
Les motos prêtes à prendre la mer
Une fois le marché conclu avec Ruchiyat de TLS pour le transport des bécanes, nous nous sommes concentré sur notre itinéraire à nous. Nos recherches nous portaient à croire que Los Angeles serait le meilleur endroit pour obtenir le visa de « visiteur » requis pour Deniz. Le site du CIC (Citoyenneté et Immigration Canada) nous permettait de faire une demande « en ligne » et d'espérer avoir le visa dans un délai de 19 jours. 
Nuit folle à Shanghai

Après avoir essuyé de nombreux refus à notre demande d'hébergement sur le réseau Couchsurfing, Bruce et Valerie ont accepté de nous recevoir dans leur somptueuse demeure à l'architecture espagnole typique du sud de la Californie, située sur les collines de Glendale et nanti d'une vue imprenable sur la vallée et la ville en contrebas. 
La vue chez Bruce et Valerie

La compagnie aérienne China Eastern, à qui nous avions confié la responsabilité de nous transporter jusque là, avait planifié un départ de Bali à 3:30h du matin sans considérer le fait que l'aéroport international de Bali est fermé la nuit jusqu'à 6:00h du matin. Nous nous sommes retrouvés une bonne centaine de personnes au comptoir de la compagnie avec des grands points d'interrogation dans la face, plusieurs d'entre nous ayant des connexions de prévues plus tard dans la journée à Shanghai. Compte tenu des circonstances et contrairement aux autres expériences vécues avec un « fleuron » canadien, le service de l'entreprise fût impeccable. 

Décalage horaire dans le métro de Shanghai 
Notre horde fut transportée pour quelques heures dans un chic hôtel à proximité, logé, réveillé, restauré et ramené à l'aéroport pour le décollage à 7:30h. Une fois arrivé à Shanghai notre groupe, maintenant plus restreint, fut pris en charge de la même façon attentionnée. Et nous passâmes une magnifique soirée à Shanghai, en compagnie de nouveaux amis.es de fortune.
La célèbre plage de Santa Monica
À Los Angeles j’espérais, bien naïvement, pouvoir faire « pression » pour accélérer les délais exigés par les fonctionnaires canadiens pour émettre un simple visa. Je ne vous exprimerai pas ici toute ma frustration face à cet état des choses typiquement canadiennes, mais je me permet de vous dire que le Canada est le champion incontestable de la procédure jurassique pour émettre un simple visa à tous les ressortissants des pays qui doivent en faire la demande. Une situation injustifiable et incompréhensible en 2013. 
Fonctionnaire canadien à Hollywood


Malgré les déclarations contradictoires sur leur site officiel, c'est un minimum de 30 jours qu'il faut aux fonctionnaires canadiens pour émettre un bout de papier à coller dans le passeport donnant la permission de franchir les portes du pays. Même les conservateurs et protectionnistes États-Unis n'ont mis que 24 heures pour accorder un visa de 10 ans à Deniz!

Donc aussi bien profiter de cette occasion pour visiter le sud californien, et de faire connaissance avec les américains les plus avant-gardistes du pays. En Californie il fait beau, toujours beau. Une Mustang décapotable s'imposait pour remplacer nos motos, et parcourir la magnifique route #1 qui longe la côte-Ouest californienne. 

On a commencé par se rendre à San Francisco, chez une amie d'enfance de Deniz qui a fait le choix de migrer ici pour des raisons professionnelles évidentes : Maya est plus que brillante dans le domaine de la robotique. Elle et Raffay, sont mari pakistanais, habitent la banlieue de San Francisco, au cœur de Silicon Valley. 
Deniz et Maya

Une heureuse coïncidence a voulu qu'ils avaient tous les deux un voyage d'affaires de prévu dans les jours suivants. Après avoir passé une joyeuse fin de semaine avec eux, ils nous ont chargé de s'occuper des chats et de profiter de leur logement pendant leur absence.
Il nous restait encore beaucoup de temps à écouler pour permettre aux bureaucrates ottawasiens de remplir leur feuille de temps. Nous avons décidé de l'utiliser à bon escient en suivant la suggestion de notre hôte Bruce en visitant les parcs de Yosemite et celui des séquoias géants, un peu plus au sud.
La vallée de Yosemite
Notre séjour dans ces régions verdoyantes et majestueuses demeurera un souvenir impérissable de notre grand voyage qui s'achève. La splendeur grandiose des paysages et des routes que nous avons parcourus, restera gravé dans nos mémoires encore longtemps. 

Même pas bon pour faire du bois de chauffage... pfff!
On comprend aisément l'attrait du monde entier pour cette partie du globe au climat et à la vie si agréable.
On finit de passer le temps à San Diego, tout près de la frontière mexicaine, une des villes américaines les plus sympathiques qu'il m'est été donné de visiter.
Bien que je me languis de revoir ma petite famille, j'ai l'impression que le voyage a décidé pour moi que je devais absolument voir ce coin du monde avant de retourner dans mon bled.
Au plaisir d'être réuni avec tous ceux de mon pays que j'aime, et en espérant pouvoir bientôt accueillir chez-nous tous ceux qui m'ont accueilli pendant ce voyage qui ne prendra jamais fin.