04 août 2012

On aura beau dire




On aura beau dire ce qu'on voudra, les italiennes et les italiens savent vivre. La Dolce Vita c'est l'art de vivre à son summum du raffinement. Ça commence bien sûr par la bouffe. La gastronomie italienne est sans aucun doute l'une des plus divines. Des ingrédients simples, frais et bien dosés s'agencent agréablement pour le plus grand plaisir du palais. Bien que leurs pains ne soient pas très « santés », ont leur pardonnent aisément cet écart tellement le reste est délectable. Alors autant vous dire que notre séjour en Italie a été gargantuesque.
Pendant toute la durée de notre séjour en Italie Deniz et moi n'avons cessé de faire des liens, de voir des analogies entre l'Italie et la Turquie. Même leurs crèmes glacées se ressemblent beaucoup! C'est vous dire combien on a aimé!
Après notre séjour chez Riccardo à Trieste, nous nous sommes rendus jusqu'à Venise. Le jour même que nous avons choisi pour visiter Venise s'adonne à être la fête du « Redentore » :La Festa del Redentore c'est la fête de la vie, la fête de Venise qui a survécu à l'épidémie de peste de 1575-1576, qui tua près de 60.000 vénitiens malgré les mesures de précaution prises pour l'endiguer. La date de la fête a été fixée depuis son origine, au troisième dimanche de juillet, en souvenir de la promesse faite à Dieu par le doge Alvise Mocenigo. 
En effet, le 4 septembre 1576, en guise d'ultime remède à la virulence de la peste et conformément au vœu du Doge, le Sénat décida la construction d'une église dédiée au Christ Rédempteur sur l'île de la Giudecca où, chaque année, le Doge accompagné de tous les dignitaires et de tout le peuple de Venise, assisteront à une messe solennelle après avoir traversé le canal de la Giudecca sur un pont de barques. 
La Fête du Redentore, “la Festa del Redentore”, la Sagra del Redentore, est l'une des plus grandes fêtes populaires de Venise, qui a toujours vécu en symbiose avec l'eau de la lagune et de la mer qui l'entourent.
Venise se prépare

Les traditionnelles 
feste sull'acqua”, les fêtes sur l'eau, sont les plus belles fêtes vénitiennes, liées à des évènements marquants de l'histoire des vénitiens, qui y participent toujours avec la même joie et la même ferveur qu'autrefois. Et parmi elle, la Festa del Redentore (la fête du Rédempteur) ou Sagra”, la fête sacrée, est la fête sur l'eau par excellence.
La veille du troisième dimanche du mois de juillet, le samedi soir, tous les Vénitiens partent en famille sur leurs bateaux à rames ou à moteur, décorés de ballons multicolores, de feuilles, de fleurs, de guirlandes et de lampions. On ancre ensuite les bateaux dans le bassin de Saint Marc pour… pique-niquer et s'amuser à bord, en attendant la tombée de la nuit et le 
spectacle du feu d'artifice qui sera tiré depuis la rive de l'île la Giudecca. 
C'est ainsi que nous avons passé notre unique soirée à Venise, après avoir traversé à moto le delta du Pô, le plus important fleuve italien.
Un pont de péage sur le Pô

En direction de Sienne, où nous étions attendus par Dario y Rebbeca, des amis de Riccardo, on voulait faire une courte escale à Ravenna qui s'est avérée être déserte (ou presque...), toutes ses âmes ayant quitté la ville pour aller se tremper les fesses dans les eaux de la mer toute proche. Nous avons donc passé la nuit dans un petit village à quelques kilomètres à peine, bondé d'italiennes et d'italiens en bikini/speedo et gougounnes d'usages, tirant leur marmaille sur le sable de la plage municipale. Une soirée mémorable!
"Petite" église de Sienne

Disons que le petit-déjeuner est le seul repas que les italiens négligent, se limitant souvent à des pâtisseries sucrées, pas très nourrissant pour les motards au long cour que nous sommes. En quittant Punta Marina la route choisie nous menait au travers des « Alpini », les petites Alpes, pour déboucher sur la vallée du Chianti. Une route très fréquentée par les motards italiens, fervents des lacets montagnards. À la pause casse-croûte au sommet du col, on a compté plus de motos que tout autres véhicules confondus.
Au sommet du col les motos discutent entre elles
En redescendant dans le Chianti on comprend vite pourquoi les italiens ont choisi cette région pour y cultiver leur précieux raisins depuis des milliers d'années. Les petites routes sinueuses qui sillonnent les vallons sont absolument fantastiques à parcourir en moto. Le paysage est un véritable jardin d’Éden d'où jaillit un nectar aujourd'hui mortel pour moi. Ça ne m'en émeut pas moins.
Montechiaro

Dans le Chianti les propriétés immenses et ancestrales valent des fortunes. Elles sont constituées de plusieurs bâtiments, maisons de servitudes et autres dépendances. Dario et Rebbeca ont choisi de vivre, avec quelques co-locs, dans une de ses « maisons ». Ce n'est pas le grand luxe (celles-là sont réservées aux riches touristes) mais pour une somme très raisonnable ils y ont une vie très très agréable. Ils habitent à Montechiaro qui n'est pas même un village, mais situé à moins de 10 km de Sienne, une des plus belles villes d'Italie, où ils ont fait leurs études en anthropologie. 
Ils nous ont reçu pendant trois jours comme seuls les italiens savent le faire, avec chaleur et générosité. Chaque repas partagé avec eux et leurs amis(es) fut un joyeux festin. Nos nombreuses conversations portant sur l'état du monde finissaient toujours par se rejoindre quant aux symptômes et aux remèdes à y apporter, nos préoccupations sont les mêmes pour le présent, nos angoisses et nos espoirs pour l'avenir aussi. Quand est venu le moment de les quitter Dario nous a envoyé chez sa sœur qui habite à Pulfero, un minuscule village situé à la frontière de la Slovénie, très facile à intégrer dans notre itinéraire de retour à Graz. Le cœur plein de gratitude nous sommes partis vers Florence où on a fait une trop courte pause, pour s'arrêter à Schio, au pied des Alpes italiennes, les vraies.
Pause au creux des Alpes

On prévoyait n'y passer qu'une nuit, mais en quittant cette jolie petite ville, la grosse pluie battante et l'orage qui s'abattait nous ont découragé de s'aventurer dans les montagnes. Le lendemain ferait très bien l'affaire. On a rebroussé les 10 km déjà parcouru et on s'est ré-installé au même endroit. Un dimanche après-midi, dans une « petite » ville italienne au pied des Alpes, c'est extrêmement tranquille! Le seul endroit ouvert pour se restaurer s'avère être un boui-boui Turc. Deniz se met à parler avec le jeune proprio qui s'enthousiasme et décide de fermer sa boutique illico pour nous inviter chez lui pour y prendre le thé, rencontrer sa copine Serbe et leur animalerie qui consiste en deux chiens, une perruche, un serpent, une tortue et deux aquariums remplis de poissons exotiques. Il était tellement heureux de parler Turc que Deniz et lui se sont fait la conversation pendant près de deux heures, me mettant au fait de la teneur de leur propos de temps en temps. Il exprimait surtout sa difficulté à co-habiter avec le reste de la communauté musulman, assez nombreuse dans cette petite municipalité, pour lui qui ne « pratique » pas.

Au matin suivant, nous nous sommes élancés au cœur des Alpes. Les Alpes, quelles soient Italiennes, Autrichiennes ou Slovènes, c'est un spectacle grandiose, une apothéose de la nature. Rouler à moto dans leurs creux, grimper leurs sommets dans des lacets interminables, longer leurs cours d'eaux qui jaillissent de leurs flancs comme par magie, c'est une expérience inégalable. Deniz s'est montrée d'une extraordinaire endurance et d'une grande habileté pour une motocycliste débutante à parcourir ces paysages majestueux, qui inspirent l'humilité de façon indiscutable.
On a dû prendre une pause un peu plus longue que prévue à Belluno, quand la pluie s'est mise à tomber un peu fort. Heureusement nous étions attablé dans un endroit qui s'occupait merveilleusement bien de nos papilles gustatives et la pause en fut d'autant plus agréable.
Notre palace chez Stefania et Alberto

Stefania, la sœur de Dario, et Alberto nous attendaient patiemment. Ils sont tous deux motards et rêvent de partir, comme nous, pour une grande aventure. Ils nous avaient préparé un palace pour dormir et un banquet somptueux en compagnie de leurs meilleurs amis(es). La soirée sous une voûte étoilée magnifique fut délectable et fort animée. Ils furent si sympathique et enthousiaste! Dommage de ne pas avoir un peu plus de temps à passer en leur compagnie.
En partant de Pulfero, on traverse tout de suite en Slovénie, à peine quelques kilomètres plus loin. Nous avions opté cette-fois pour traverser le parc National de Triglav, en Slovénie. Une fois encore, la grandiloquence des Alpes nous a laissée sans voix. 
Avouez que y a pas grand chose à dire d'autre!


Les dessins s'affichant sur l'écran du GPS en disent long sur le tracé à parcourir. Une fois entrée en Autriche la route longeait les montagnes qui ont de tout temps constitué les limites naturelles séparant les deux pays.
Notre retour à Graz s'annonçait bien occupé. Qu'on le veuille ou non, après 9 mois de vie dans un même endroit, on recommence à accumuler. Des objets, des obligations, des relations. Il fallait aussi faire certains préparatifs en vue de partir à moto, de quitter « définitivement » l'Autriche afin de se rendre jusqu'en Turquie pour commencer.
Deux jours avant le départ, j'avais encore un étal au marché aux puces hebdomadaire de Graz pour y vendre à des prix dérisoires les divers objets acquis au fil du temps. Heureusement que les amis(es) ont participé et profité.
Lucas, un sympathique aurtrichien, au marché-aux-puces

Mis-à-part ma relation avec quelques rares individus(es) (qui viennent d'ailleurs, à bien y penser) je ne garde pas de grandes amitiés avec les autrichiennes et les autrichiens. Ils sont chaleureux comme un « plywood », aussi liants et affables qu'une feuille de gypse. Tout y semble parfait et c'est l'apparence qui tient le haut du pavé.
En quittant l'Autriche on a pris la direction des Balkans et je peux d'ores et déjà vous confirmer que les hongrois, les serbes et les bosniens sont en feu, hyper accueillants, comparés aux autrichiens. Il règne ici un espèce de chaos anarchique empreint d'une humanité compatissante et réconfortante plus proche de ce qui réunit les êtres humains, plutôt que ce qui crée leurs différences. Je vous en reparle après le thé, la musique, les rires et les larmes...