29 novembre 2010

De neige et de sable

 Depuis mon retour à Marseille j'éprouve une curieuse sensation. J'ai d'abord pensé que c'était les suites de l'accident, que j'avais un grand besoin de repos. Il y avait sans doute un peu de ça aussi...mais les jours passant je crois avoir trouvé la source de mon manque d'énergie: L'HIVER, kaltorrr!!!
La météo marseillaise est assez poche depuis deux semaines. Pluie, grêle, plutôt froid pour la saison, et même de la neige dans les montagnes qui sont à peine à 40 kilomètres au nord. Mes amis(es) français(es) passent leurs temps à dire: «on sait bien! Pour toi le canadien, c'est pas froid 5°C...» Et bien détrompez-vous !!
J'ai un furieux besoin de m'emmitoufler, d'hiberner jusqu'à ce que j'hiverne vers le sable chaud.
Après avoir généreusement contribué depuis 45 ans, je me fais une immense joie, pour une fois, que dis-je, un plaisir incommensurable, de ne pas avoir à subir les affres de l'hiver toute une année durant. Plusieurs me demande si ça va me manquer, les joies de l'hiver: PAS UNE TABAR...OUETTE DE MINUTE! Ne vous méprenez pas, je n'ai jamais haït l'hiver. J'en ai même tirer un certain plaisir en pratiquant, sur une période de 45 ans, presqueTOUS les sports et activités qui peuvent rendre cette saison somme toute agréable.
Je garde, par contre, un vif et douloureux souvenir de mes expériences professionnelles hivernales. Ça paraît bien amusant, pour plusieurs, de faire du cinéma dehors, en hiver. Les résultats ont toujours l'air de moments heureux.
 La p'tite famille qui joue dehors bien chaudement habillé par une belle journée d'hiver ensoleillée, c'est toujours bon vendeur pour la pub de mitaines. Sauf que pour avoir ce résultat il faut se lever à 4h du matin, partir et déglacer la voiture, passer 12h à faire le pied de grue dans un mélange de slush ou enfoncé dans la neige jusqu'aux couilles avec des trépieds de métal qui te gèlent les mains, même à travers les mitaines à $100 que tu viens d'acheter. Ou encore la fameuse scène du petit couple qui s'embrasse sur un banc de parc pendant qu'il tombe une petite neige bucolique à la tombée du soir. Tellement mignon! Pour celle-là il faut tourner une bonne partie de la nuit, à -40°C avec le facteur éolien, changer 4 fois les feutres de tes bottes d'expédition polaire et finir par sortir les câbles électriques de sous la glace à la hache parce qu'ils se sont enfoncés en faisant fondre la neige. Rendu là, les 14 espresso et le Red Bull n'ont plus d'effet du tout du tout du tout...
Alors pour toutes ces raisons et bien d'autres encore, NON, ça ne me dérange pas pantoute de pas faire de patin ou de ski cet hiver. J'ai plutôt envie de tenter une expérience singulière: j'aimerais semer des pissenlits dans le désert, de la Tunisie jusqu'à l'Égypte. J'entends déjà s'élever les voix de ceux et celles qui sont persuadés que ça ne fonctionnera pas; JE M'EN CONTRE...PLISSE ! J'va pelleter du sable à 30°C avec une pelle-jouet en plastique. J'vais même le faire tous les matins en guise de compassion pour ceux et celles qui le font avec de la neige, pour aller travailler avec leur voiture tous les jours. Alors auriez-vous l'amabilité de m'envoyer un sac de graines de pissenlit SVP, la variété m'importe peu...mais jaune surtout.
Suite à mon accident, j'en ai profité pour consulter une ostéopathe parce que mon épaule demeurait douloureuse: elle m'a apprit que j'avais une côte de cassée. Pour ça on ne peut rien faire et il faut ne rien faire pour que ça s'arrange. J'ai choisi d'utiliser ce temps libre pour transformer ce blog en site internet. Ça change pas grand chose pour vous, sauf l'adresse si vous l'aviez déjà mise dans vos favoris; www.capitainepopov.com . Vous remarquerez au passage les petits changements.  C'est pour me permettre de vous offrir un contenant plus attrayant, vu le succès de cette petite entreprise. C'est aussi la raison pour laquelle certain d'entre vous (ceux qui m'avaient pas encore écrit un petit quelque chose...) ont reçu un courriel leur demandant s'ils désiraient conserver leur abonnement. Tout sera prochainement automatisé ! Et oui! C'est aussi ça la technologie! Et bientôt, avec le 3D, j'vais même pouvoir vous envoyer une poignée de sable avec ça! MDR!

Je pars donc incessamment rejoindre mon ami Nawfel qui habite Tunis. La traversée de la Méditerrané se fera sous forme de mini-croisière (22 heures, de 5°C à 20°C YESSSS!). Ce sera pour moi une étape prolongée puisque je dois y préparer la suite de cette aventure. Plusieurs des pays vers lesquels je me dirige demandent des visas et autres procédures diplomatissantes
 Ma fille adorée vient aussi m'y rejoindre le temps de son long congé scolaire. On va tous les deux attendre de pied ferme le gros bonhomme rouge tonitruant et ses coursiers alambiqués, entre deux dunes de sable brulant.
Je vous laisse sur les images de Loïs qui en a encore pour quelques années à apprécier le joufflu couperosé.


Salam alikoum

21 novembre 2010

La Noce

 J'ai enfin épousé ma Marseillaise ! À force de patience et d'imagination, elle a cédé à mes avances...ou serait-ce moi qui ai cédé aux siennes? Pour cela, j'ai pratiquement dû prendre pays. La voici donc. 

Mis-à-part quelques accessoires qu'elle a en plus, elle est en tous points identique à sa défunte sœur allemande, Fraülein. Les technicités administratives ont été un peu complexes à résoudre, et j'ai dorénavant une adresse et un compte en banque à Marseille grâce à mon amie Aziyadé. Elle a d'ailleurs dû prévenir son amoureux que mon nom serait sur sa boîte aux lettres pour éviter le quiproquo.
J'ai bien tenté par tous les moyens possibles d'éviter de participer aux avantages sociaux français (TVA), mais ça compliquait beaucoup les choses au niveau de l'immatriculation pour le reste du voyage. À un certain moment j'ai même faillit prendre l'avion pour me rendre en Belgique, qui semblait plus flexible vis-à-vis ma situation. Je n'attend plus que son passeport canadien pour pouvoir poursuivre l'aventure.
Toute sa famille (BMW Marseille) a fait preuve d'une grande sollicitude à mon égard: à commencer par Stephane mon conseiller commerciale (vendeur), Claudine à l'administration et enfin Yannick, le chef d'atelier, que je ne remercierai jamais assez. J'avais demandé à avoir accès à un espace intérieur pour pouvoir procéder à l'installation des accessoires (dispendieux) que j'avais récupéré sur le cadavre de Fraülein. L'atelier étant restreint aux employés uniquement, pour des questions d'assurances, il a fallut improviser. Stephane, s'étant commis à accéder à ma demande, m'a gentiment installer dans la salle de montre, sous le grand escalier, derrière un écran publicitaire. C'est là que je l'ai complètement déshabillé pour la première fois. En m'apercevant à la dérobé, plusieurs personnes m'ont tour à tour proposé un boulot à l'atelier, que j'ai décliné avec mon plus beau sourire, mon seul désir étant de convoler avec elle le plus tôt possible.
J'ai mis un jour et demi à tout fignoler, avec l'aide précieuse de Yannick. C'est au moment d'enfiler mon casque, pour la première fois en trois semaine, que j'ai ressenti une vive émotion: veux/veux pas une petite appréhension s'est emparé de moi en revoyant dans ma tête le choc de l'accident. Après cinq cents mètres c'était disparu et j'évaluais déjà les ajustements à faire. Mon épaule et mon bras gauche m'apparaissent encore fragiles, voir douloureux lors de certaines manœuvres, mais je dispose encore d'une dizaine de jours pour rouler sans tout le bagage et permettre aux muscles de se refaire une santé.
J'ai toujours l'intention de faire un détour par la Corse avant d'aller passer les Fêtes en Tunisie. Ce qui me forcera à faire une petite croisière sur la Méditerrané dans les prochaines semaines; ce sera notre voyage de noce.
Pour l'instant, je cuisine et je fréquente la salle obscure du coin de la rue, assidûment.
Toute cette mésaventure n'arrive certainement pas sans raison. Bien que je n'en ais pas encore saisi toute la portée, elle m'a déjà permis de prendre conscience de différentes choses. Tout d'abord la gentillesse et l'empressement à m'aider de toutes les personnes qui ont croisé ma route. J'ai été surpris, voir parfois embarrassé, par tant de générosité spontanée. Consolez-vous car, contrairement à ce que l'on imagine souvent, il y a beaucoup plus, chez les êtres humains, de bienveillance que de mauvaises intentions.

Ensuite, les quatre mois qui viennent de passer ont été un sérieux entraînement pour la suite de mon périple. Je suis désormais plus nomade que sédentaire, ce qui a entièrement transformé ma façon d'apprécier certains détails de la vie, comme de pouvoir cuisiner, faire la lessive, toutes ces petites choses qu'on finit par faire sans y prêter attention.
Et vous? Quel serait donc le petit aspect du quotidien qui vous manquerait le plus si vous viviez dans une valise, sur une moto?

11 novembre 2010

Aye aie aille!

 Il y avait l'Espagne devant moi, avec toutes ses promesses de soleil, de femmes enflammantes, d'architectures regorgeant d'histoires qu'on imagine nobles et grandioses. Barcelone était à la hauteur de la fiereté catalane. Je l'ai parcouru encore et encore, dans tous les sens, à la recherche de ces trésors cachés qu'on ne découvre qu'en s'y fondant. J'ai bien sûr fait connaissance de ses facettes les plus vedettes, sont petit côté jet set. Mais il n'y a rien comme les petites besognes quotidiennes pour entrer en contact avec la véritable personnalité d'une...ville. Fraülein avait aussi besoin d'une petite visite à la clinique, avant de poursuivre notre route. Ignacio, le tenancier français d'un petit atelier de moto, l'a bien bichonnée.
D'avoir quitté Marseille, que j'ai tant apprécié, m'a laissé comme un vide, un sentiment qui ressemble à celui qu'on éprouve après avoir quitté une femme qu'on a aimé. J'ai donc un peu erré dans Barcelone à la façon d'un amant désabusé. J'ai fini par chercher réconfort auprès de mon club select d'amis(es) de Bill. L'effet a été instantané ou presque; mon impression d'isolement a doucement disparu. J'y ai même rencontré un vieil ami dont j'avais, brièvement mais intensivement, fait la connaissance il y plusieurs années.
J'ai habité, pendant une quinzaine de jours, chez la senora Malvina. Une sympathique dame dans la soixantaine qui vit avec son fils Albertino, grand garçon gâté dans la trentaine. Leur appartement, dans une tour d'habitation chic, au cœur d'un quartier en plein développement, est situé à 200m de la plage. Mme Malvina, qui parlait très bien français, m'a donné quelques leçons d'espagnole. J'me suis donc mis en tête de parfaire mes connaissances de cette langue que j'adore, qui ressemble tellement à la nôtre finalement. Mais il y a les idiomes et Barcelone est plutôt Catalan; c'est un peu comme un français qui essaierait de comprendre un gaspésien lui expliquer comment on pêche le bigornot. J'ai commencé à lire un roman en espagnol, puis aller voir des films; la caissière du cinéma m'a gentiment fait remarquer que le film était en espagnol, quand je lui ai fait répéter deux fois ce qu'elle me disait...yes yes señorita, quiero aprender.
Après dix-huit jours de Barcelone, le temps était venu de partir à la découverte du reste de ce pays fascinant et chaleureux. Sans compter que le thermomètre du sud était très invitant. Depuis le début de mon aventure j'ai tendance à préférer les routes longeant l'océan; le paysage y est toujours d'une splendeur qui remplit mon âme de calme et de sérénité, j'ai l'impression de faire de la méditation contemplative. À cette période de l'année, les petits hameaux sont désertés par la faune touristique qui les animent en d'autres temps. 
On y retrouve les seuls habitants qui respirent enfin à un rythme plus approprié aux lieux. C'est dans un de ces petits villages, aux allures presque fantomatiques, que c'est arrivé. Le soleil était sorti, lui qui était resté caché presque toute la journée. Le village semblait presque abandonné tellement il n'y avait rien ni personne. J'admirais les petites maisons typiquement espagnoles qui bordaient la route et tout à coup PAF! cette fourgonnette, sorti de je ne sais où, m'a frappé, fort. Le temps de penser à une dizaine de conséquences (un million tellement la pensée va vite et que tout semble se passer au ralenti) et je suis étendu par terre en maudissant mon inattention. Je commence par remuer mes membres un à un; tout bouge, mais l'épaule gauche grince beaucoup beaucoup. Je finis par me relever doucement. La moto est un désastre; les valises toutes tordues, l'avant semble avoir été touché durement. La police, l'ambulance et tout le tralala... Un des policiers parle français et il me promet de s'occuper de tous mes bagages avant que je parte pour l'hôpital le plus proche situé à une trentaine de kilomètres de là.
J'ai l'occasion de pratiquer mes nouvelles notions d'espagnol à plusieurs reprises avec des infirmières ma foi très mignonnes; eh oui! même (surtout) dans les pires situations, les gars, on pense juste à ça! Comme je n'avais rien de bien grave, on m'a mis dans un taxi afin de retourner là où était resté mes bagages et ma défunte Fraülein. Quand on la regarde comme ça, ça paraît pas si pire: mais elle est sur la béquille centrale, la direction tordue dans les deux sens. Irrécupérable!
J'ai fini par passer cinq jours dans le très charmant petit village d'Ampolla, dans le delta de l'Ebre. Les gens de l'hôtel, le garagiste où la moto a été remorquée, le policier qui est motard aussi, tout le monde a été d'une gentillesse touchante pour le loco chico qui fait un grand voyage. 
Me voici donc revenu à Marseille pour faire l'acquisition d'un clone de Fraülein; impossible à faire en Espagne, mon ami Robert, le gentil policier, s'est renseigné pour moi. On verra bien si la bureaucratie française sera plus ouverte! Martina et Jean ont accepté, dès qu'ils ont su ma mésaventure, de me prêter à nouveau leur appartement marseillais, afin que je puisse faire le nécessaire. Aziyadé est d'une générosité incommensurable; j'ai pas pu accepter qu'elle me prête sa moto, alors elle m'a offert sa voiture, l'imprimante/scanner quand j'en ai besoin, un garage pour installer les accessoires que j'ai récupéré, etc... Elle m'a même mis au défi de demander quelque chose qu'elle ne pourrait trouver! Je lui ai demandé de me faire rencontrer une femme libre, qui fait de la moto et sans fard (dans l'ordre)... Elle y travaille très fort. Hasta luego