08 juillet 2013

Au revoir l'Asie! Bonjour l'Amérique!

Les plantations entre Jakarta et Bandung
Leo nous avait donné rendez-vous dans un village sur la route entre Jakarta et Bandung. Avant de partir de Jakarta, Momon avait pris soin de nous tracer un itinéraire « panoramique », en tentant de nous faire éviter les endroits où le trafic était plus intense. Peine perdue, le trafic est intense partout en Indonésie. On a bien traversé des montagnes parsemées de villages et de plantations de thé magnifiques, mais sitôt arrivé dans une agglomération importante, la densité de la circulation étouffante nous rattrapait.
Leo et cie

Quand on s'est arrêté à la station d'essence du village où on avait rendez-vous, il s'est encore mis à pleuvoir dru. Leo est arrivé complètement trempé avec sa grosse BMW R100, un sourire contagieux collé dans la face. On a pris le temps de se restaurer un peu, permettant à la pluie de s'estomper tranquillement, avant de reprendre la route jusqu'à la résidence de Leo, dans les montagnes tout près de Bandung.
Deniz à l'oeuvre, près de la cuisine

Le système électrique de la moto de Deniz s'était remis à faire des siennes en quittant Jakarta et nous avions hâte d'arriver avant de tomber en panne, bien qu'en compagnie de Leo je m'inquiétais un peu moins : c'est un monsieur plein de ressources. Avec mon système de charge qui ne fonctionnait qu'à moitié, on avait comme un problème d'énergie qui circulait mal. Heureusement que Leo, sa femme Rika et leurs deux enfants étaient là et nous accueillaient à bras ouverts. Leur « maison » très confortable est très spécialement conçue : le rez-de-chaussé est une grande pièce ouverte consacrée aux motos et à la préparation d'expéditions, agrémentée d'un coin salon accueillant et de la cuisine réservée à Rika.
L'atelier dans le salon
Au deuxième, 2 chambres sommaires mais confortables, une salle de toilette et un coin télé, qu'on a jamais vu allumée. Le tout est une structure de bois recouvert de bambou, assis sur de la pierre cimentée d'un plus bel effet, situé à flanc de montagne avec vue sur la ville et le volcan au loin, traversé d'une rivière endiablée : décor enchanteur! Même si les réparations prenaient un peu de temps, ça ne nous embêtait pas du tout. 
Le coeur électrique de ma Marseillaise
Il a fallut trois jours pour que tout soit rentré dans l'ordre côté mécanique. Les journée ont passé doucement et les ennuis se réglaient de la même façon. Il fallait bien partir si on voulait un jour rejoindre Bali. Et il y avait encore tant à voir sur Java. Les communications ne fonctionnaient pour ainsi dire pas à la maison dans la montagne. Chaque visite en ville, 8 km plus bas, devenait une expédition planifiée. Une super batterie neuve pour Tesla, une bobine d'alternateur refaite complètement pour ma Marseillaise, et nous étions prêt à reprendre la route vers l'Est.
Avant de descendre dans le cratère de Bromo

Notre première étape, à Malang, était pour s'informer sur la meilleure route à prendre pour se rendre au volcan de Bromo. La « meilleure route » s'est avérée être aussi une extraordinaire aventure de moto. Ce qui avait débuté par une jolie route de campagne asphaltée, s'est transformé peu à peu en petite route cahoteuse de montagne pour se terminer en une randonnée surréaliste dans l'immense cratère de sable noir du volcan au repos. 
Elle est oû la route?

L'hôtel, simple et convenable, situé sur la frange du cratère, disposait encore d'une dernière chambre que nous nous sommes pressés d'accepté avec joie, trempés que nous étions par l'averse quotidienne de l'après-midi passé dans la brume qui s’engouffre au fond du cratère. Pour savourer vraiment la magie de ce lieu mystique, il faut se lever très tôt et grimper au sommet de la bouche du volcan pour y admirer le lever du soleil. 
La récompense des lève-tôt

L'avant-midi se prêtait donc très bien à la pratique follement amusante de la moto « hors pistes » : la mer de sable noir, bien trempée par la pluie, est vite devenue un immense terrain de jeu, idéal pour s'amuser comme des enfants dans le « grand carré de sable ». La pluie et le brouillard qui s'installe après le dîner, nous obligeait presque à la sieste, et nous n'avons pas résisté.
Deniz s'amuse un peu dans le grand carré de sable

Le climat frais et très humide qui prévaut là-haut, à 2500 mètres, contrastait agréablement d'avec la chaleur torride qui régnait une fois redescendu.
Pendant le trajet vers Yogyakarta, Leo avait contacté le chapitre local des « Biker's Brotherhood » et nous y étions attendu. Yogyakarta est une ville très « artistique », très particulière pour les Indonésiens. La cité intérieur du Sultan qui à résisté avec brio aux envahisseurs Deutch il y a longtemps, demeure encore aujourd'hui vivante et vibrante. 
Une jolie bande de motards qui vient de se lever

Wisnu est le patron d'une entreprise florissante qui remonte des Harley Davidson, et l’attentionné mari d'Érika, une des plus célèbres artistes peintres d'Indonésie. Elle fait de la peinture « naïve » et a un carnet de commande démesurés. C'est aussi une motocycliste et sa Harley est des plus originales, peinte de ses propres mains : un véritable chef d’œuvre. 
Le chef d'oeuvre d'Érika

Ces deux là étaient fait pour vivre ensemble. Pendant notre séjour à Yogyakarta, nous avons littéralement été pris en charge par cette communauté singulière qui gravite autour d'Érika et de Wisnu. Un petit essaim discret d'hommes et de femmes pourvoit à tous leurs besoins dans leurs nombreuses résidences dédiées aux différentes activités. Érika et Wisnu ont même délaissé leurs obligations pour se faire une randonnée en notre compagnie au temple de Borobudur et y prendre un copieux petit-déjeuner au lever du soleil. 
L'atelier de l'artiste en pleine production

Quelqu'un venait nous chercher à tous les soirs pour nous emmener partager le souper en leur compagnie. Il nous a fallu insister sur notre agenda pour quitter Yogyakarta, avec la promesse de garder contact.

Nous approchions maintenant de Bali. Patrick, que j'ai connu dans de sombres mais heureux sous-sols d'église, vit aujourd'hui à Bali avec sa conjointe indonésienne Ari. Ari travaille pour une prestigieuse agence de voyage balinaise. Ce sont eux qui nous ont aidé à obtenir un visa indonésien de 2 mois, et qui nous attendaient à Ubud, dans la magnifique résidence qu'ils louent depuis plus de 2 ans maintenant. 
Dans la bouche d'Ijen
Ari nous avait fortement suggéré et gentiment organisé un séjour au très chic « Ijen resort » sur Java, tout près du volcan du même nom, et à quelques kilomètres du traversier pour Bali. 
Les cueilleurs de souffre

Ébahi par tant de beautés nous avons décidé d'y passer 3 jours et nous avons gravi les 3 kilomètres pour se rendre jusque dans la bouche de se cracheur de feu assoupi mais encore très actif. Tout au long de l'ascension on croise un défilé incessant de porteurs de souffre qui puisent le minerais directement dans le fond du cratère et qui l'acheminent jusqu'en bas en le portant sur les épaules dans des paniers de fortune, le tout pour quelques misérables dollars par jour. Arrivé en haut, la vision est spectaculaire et dramatique.
Le jardin qui jouxte notre petite résidence chez Patrick et Ari

Ne nous restait plus qu'à traverser le petit bras d'océan qui sépare Java de Bali, et de poser nos béquilles de motos dans le paradis de Patrick et Ari pour s'offrir un grand repos bien mérité. Il nous restait 3 semaines de visa pour explorer l'île et organiser l'expédition des motos directement à Montréal, puisque malgré toutes nos tentatives et nos recherches il nous était impossible d'obtenir des assurances nous permettant de circuler sur le bitume nord-américain. Une véritable absurdité! Après avoir fait pratiquement le tour du monde sans problèmes, impossible de revenir à la maison sur nos montures. 
L'entrée d'un temple balinais

Sans compter qu'il nous fallait aussi faire la demande d'un visa canadien pour Deniz avant de se pointer aux douanes. Notre demande de résidence permanente nous a été retourné au bout de 35 jours avec une lettre nous avisant que nous avions utilisé une vieille version d'un certain formulaire, bien que nous avons téléchargé tous les formulaires sur le site d'immigration Canada. Un dossier à suivre.
L'entrée de l'oasis de Patrick et Ari

L'oasis que Patrick et Ari nous ont généreusement offert s'est avéré être exactement ce dont nous avions besoin. Après plus d'un mois de cacophonie indonésienne et de routes effrénées, démentielles, nous rêvions d'un coin vert et tranquille, et c'est très précisément ce que nous y avons trouvé. La jolie et confortable maison d'invité qui jouxte la résidence principale, a été notre havre de paix pendant notre séjour sur Bali. Patrick et Ari ont été des hôtes parfaits : attentionnés, discrets, accueillants et pleins de ressources aux moments opportuns. Encore une fois, la vie nous offrait plus que ce dont nous avions besoin.
Deniz et son activité préférée après la moto
Deniz en a profiter pour s'offrir l'ascension d'un autre volcan sur l'île voisine de Lombok et une escapade de quelques jours sur les petites îles Gili. De mon côté, j'ai mis ce temps à profit pour découvrir à moto les petites routes qui serpentes à travers les rizières autours d'Ubud, et me suis remis assidûment à la pratique yogique, l'endroit s'y prêtant tellement. Je devais aussi trouver un agent pour l'expédition des motos et organiser notre retour vers l'Amérique. Mais j'avoue que j'ai abusé, sans aucune culpabilité, du moment de paresse qui était mis à ma disposition sans préavis.
Les motos prêtes à prendre la mer
Une fois le marché conclu avec Ruchiyat de TLS pour le transport des bécanes, nous nous sommes concentré sur notre itinéraire à nous. Nos recherches nous portaient à croire que Los Angeles serait le meilleur endroit pour obtenir le visa de « visiteur » requis pour Deniz. Le site du CIC (Citoyenneté et Immigration Canada) nous permettait de faire une demande « en ligne » et d'espérer avoir le visa dans un délai de 19 jours. 
Nuit folle à Shanghai

Après avoir essuyé de nombreux refus à notre demande d'hébergement sur le réseau Couchsurfing, Bruce et Valerie ont accepté de nous recevoir dans leur somptueuse demeure à l'architecture espagnole typique du sud de la Californie, située sur les collines de Glendale et nanti d'une vue imprenable sur la vallée et la ville en contrebas. 
La vue chez Bruce et Valerie

La compagnie aérienne China Eastern, à qui nous avions confié la responsabilité de nous transporter jusque là, avait planifié un départ de Bali à 3:30h du matin sans considérer le fait que l'aéroport international de Bali est fermé la nuit jusqu'à 6:00h du matin. Nous nous sommes retrouvés une bonne centaine de personnes au comptoir de la compagnie avec des grands points d'interrogation dans la face, plusieurs d'entre nous ayant des connexions de prévues plus tard dans la journée à Shanghai. Compte tenu des circonstances et contrairement aux autres expériences vécues avec un « fleuron » canadien, le service de l'entreprise fût impeccable. 

Décalage horaire dans le métro de Shanghai 
Notre horde fut transportée pour quelques heures dans un chic hôtel à proximité, logé, réveillé, restauré et ramené à l'aéroport pour le décollage à 7:30h. Une fois arrivé à Shanghai notre groupe, maintenant plus restreint, fut pris en charge de la même façon attentionnée. Et nous passâmes une magnifique soirée à Shanghai, en compagnie de nouveaux amis.es de fortune.
La célèbre plage de Santa Monica
À Los Angeles j’espérais, bien naïvement, pouvoir faire « pression » pour accélérer les délais exigés par les fonctionnaires canadiens pour émettre un simple visa. Je ne vous exprimerai pas ici toute ma frustration face à cet état des choses typiquement canadiennes, mais je me permet de vous dire que le Canada est le champion incontestable de la procédure jurassique pour émettre un simple visa à tous les ressortissants des pays qui doivent en faire la demande. Une situation injustifiable et incompréhensible en 2013. 
Fonctionnaire canadien à Hollywood


Malgré les déclarations contradictoires sur leur site officiel, c'est un minimum de 30 jours qu'il faut aux fonctionnaires canadiens pour émettre un bout de papier à coller dans le passeport donnant la permission de franchir les portes du pays. Même les conservateurs et protectionnistes États-Unis n'ont mis que 24 heures pour accorder un visa de 10 ans à Deniz!

Donc aussi bien profiter de cette occasion pour visiter le sud californien, et de faire connaissance avec les américains les plus avant-gardistes du pays. En Californie il fait beau, toujours beau. Une Mustang décapotable s'imposait pour remplacer nos motos, et parcourir la magnifique route #1 qui longe la côte-Ouest californienne. 

On a commencé par se rendre à San Francisco, chez une amie d'enfance de Deniz qui a fait le choix de migrer ici pour des raisons professionnelles évidentes : Maya est plus que brillante dans le domaine de la robotique. Elle et Raffay, sont mari pakistanais, habitent la banlieue de San Francisco, au cœur de Silicon Valley. 
Deniz et Maya

Une heureuse coïncidence a voulu qu'ils avaient tous les deux un voyage d'affaires de prévu dans les jours suivants. Après avoir passé une joyeuse fin de semaine avec eux, ils nous ont chargé de s'occuper des chats et de profiter de leur logement pendant leur absence.
Il nous restait encore beaucoup de temps à écouler pour permettre aux bureaucrates ottawasiens de remplir leur feuille de temps. Nous avons décidé de l'utiliser à bon escient en suivant la suggestion de notre hôte Bruce en visitant les parcs de Yosemite et celui des séquoias géants, un peu plus au sud.
La vallée de Yosemite
Notre séjour dans ces régions verdoyantes et majestueuses demeurera un souvenir impérissable de notre grand voyage qui s'achève. La splendeur grandiose des paysages et des routes que nous avons parcourus, restera gravé dans nos mémoires encore longtemps. 

Même pas bon pour faire du bois de chauffage... pfff!
On comprend aisément l'attrait du monde entier pour cette partie du globe au climat et à la vie si agréable.
On finit de passer le temps à San Diego, tout près de la frontière mexicaine, une des villes américaines les plus sympathiques qu'il m'est été donné de visiter.
Bien que je me languis de revoir ma petite famille, j'ai l'impression que le voyage a décidé pour moi que je devais absolument voir ce coin du monde avant de retourner dans mon bled.
Au plaisir d'être réuni avec tous ceux de mon pays que j'aime, et en espérant pouvoir bientôt accueillir chez-nous tous ceux qui m'ont accueilli pendant ce voyage qui ne prendra jamais fin.

13 mai 2013

Surprises sur Sumatra

Il en aura fallu du temps avant de pouvoir traverser les 200 km qui séparent la Malaisie et l'Indonésie dans la partie étroite du détroit de Malacca. Nous avions établi un contact avec M Lim à Penang qui organise la traversée pour de nombreux motards à un tarif raisonnable et des procédures relativement simples. M Lim nous avait informé que la traversée s'effectuait 1 fois par semaine, le samedi, et que nous devions lui amener les motos à Penang le mercredi pour effectuer le chargement sur le bateau.
Jinsang sous le regard attentif de Deniz

En quittant Johor Baru on disposait d'une grosse semaine avant de retourner à Penang et nous avons saisi l'opportunité pour revenir vers Kuala Lumpur par la côte Est de la Malaisie. Nous souhaitions aussi en profiter pour visiter l'atelier Sunny Cycle et faire une révision mécanique complète avant de s'aventurer en territoire moins BMW « friendly ». Les chaînes des motos avaient besoin d'être changées, 1 pneu, 1 batterie, les plaquettes des freins, bref une bonne mise à jour. Jinsang, le fils mécanicien de Sunny, lui-même motocycliste aguerri, m'informa que le disque d'embrayage de ma Marseillaise avait fait son temps. Comme j'étais rassuré par leur compétence et leurs tarifs équitables, nous avons sauté sur l'occasion. 
Sunny and Co.

Nous voilà prêt pour retourner à Penang quand je m’aperçoit que le changement de batterie n'a pas réglé mon problème de charge. Il n'y a ensuite que 2 possibilités assez majeures : le régulateur de voltage ou la bobine de l'alternateur. Sunny n'a pas ces pièces en stock. Je fais donc appel à mon sauveur Roger à Montréal. Par le temps qu'on trouve une solution M Lim nous avise qu'il peut nous attendre jusqu'à vendredi pour embarquer les motos, mais pas plus et qu'il n'y aura pas de service la semaine suivante, les traversées par bateau ayant perdu de leur attrait du fait des liaisons aériennes bon marché et très fréquentes. Le temps nous joue un sacré tour. 
La bobine grillé
Il s'avérera que c'est la bobine d'alternateur qui est grillée et c'est impossible d'en avoir une dans un délai qui nous permettrais de nous rendre à Penang pour le vendredi. La pièce originale chez BMW vient avec un kit complet d'aimant et coûte une somme faramineusement BMW. Sunny m'offre de faire reconditionner ma bobine grillée pour la somme de $100 et ce sera prêt dans 2 jours. La réflexion fut de courte durée : mon papa mécano faisait toujours refaire les bobines et ça durait bien assez longtemps. Sauf qu'on a manqué le bateau de M Lim. J'étais aussi en contact avec un dénommé Izainil qui agissait comme agent pour organiser la traversée de motos avec le ferry pour passagers depuis Port Klang, à tout juste 30 km de Kuala Lumpur. Les communications avec lui étaient difficiles, manquant d'informations et pour finir désagréables. Quand les motos furent enfin « top shape », on a décidé de se rendre en personne à Port Klang et de voir comment on pouvait s'organiser nous-même. 
La descente qui mène à la porte du traversier

Ce fut un peu plus de travail pour nous mais somme toute une aventure extraordinaire que d'embarquer nos « grosses » montures dans l'allée d'un traversier de passager, en descendant les escaliers des embarcadères pas prévus pour ça. Une fois la douanes passée pas question de se faire rembourser le ticket si les motos ne pouvaient pas entrer par la petite porte du bateau. Les guidons étaient trop larges, mais en faisant un petit « twist » ça passait, parole de déménageur.
Les motos à l'étroit dans le portique du traversier

Le bateau est parti avec 2 heures de retard et il a fallu presque 5 heures pour arriver à Tanjung Balai, tout petit port de Sumatra sur la côte Est. De débarquer les motos par l'escalier à pic sur le quai minuscule et de s'affranchir des formalités de douane sous le regard émerveillé d'un foule hétéroclite de voyageurs et de douaniers perplexes, ne fut pas une simple tâche. Il a fallu faire passer les motos par l'intérieur du bâtiment et soumettre au scan chacun de nos sacs et chacune de nos caisses. 
Passée au peigne fin
Tous les douaniers étaient très avenant, mais nous n'avons pu quitter le port avant 19 heure, sous une faible pluie, à la tombée du jour, avec une bonne demi-heure de route à parcourir avant d'espérer trouver un hôtel. 
La sortie du traversier n'était pas plus aisée

Les routes Indonésiennes sont réputées pour être parmi les plus dangereuses de la planète à cause du chaos permanent qui y règne. Imaginez de nuit, sous la pluie et exténué pour notre première randonné! Le grand hôtel de Tanjung Balai nous a fait l'effet d'un mirage dans la noirceur rurale. On s'y est échoué pour 2 nuits, le temps de digérer notre arrivée et de préparer cette nouvelle étape de notre aventure. 
Tanjung Balai au petit matin

Au matin, après un surprenant petit-déjeuner, on a eu vite fait de trouver tout ce dont on avait besoin dans la petite ville que nous avions traversé la veille. Un guichet, des cartes SIM pour nos téléphones et une pour l'internet et quelques fruits pour nos estomacs au combat. On était « greillé » pour partir loin.
Le lac Danau Toba
En direction de la côte Ouest de Sumatra, le lac Toba, long d'une centaine de kilomètres, apparaît bien paisible pour un des plus grands super volcan du globe terrestre. Niché à plus de 1000 mètres d'altitude, c'était l'endroit idéal pour tomber en panne. En arrivant à moins de 1 kilomètre du village de Parapat, on décide de faire une pause thé/photo et pfffuit, plus rien ne fonctionne sur la moto de Deniz. 
Tesla tout nu

Je sors l'attirail d'outils pour m’apercevoir rapidement que je ne trouverai pas le problème et encore moins la solution, dans un court laps de temps. J'abandonne Deniz au soins du cantinier pour aller quérir un endroit où nous installer et de l'aide pour y traîner la bécane récalcitrante. Les gens de l'hôtel ont été d'une gentillesse indescriptible et ils sont venu à 3 hommes et une fourgonnette pour ramener Tesla dans la cour. Quand j'ai voulu les rétribuer pour le service ils n'ont rien voulu entendre.
Le relais fauteur de trouble

Une fois de plus, mon sauveur Roger et Sunny et sa famille, ont été mis à contribution pour nous aider à trouver la source du problème avant de tenter de le régler. Après 4 jours d'échange de courriels, de téléphones et de divers essais pas concluant, j'ai fini par découvrir l'élément fautif : le relais du démarreur. C'est en faisant une course au village avec le relais en question dans mes poches que j’aperçois 2 jeeps équipées pour une sérieuse expédition, stationnées près d'un petit hôtel, la transmission d'une des deux jeeps en petits morceaux sur la véranda. 
M Leo et sa famille, fier fondateur du "Bikers Brotherhood"
Les deux jeunes indonésiens ont eu tôt fait de me présenter au « chef » du groupe, M Leo, un membre fondateur du « Bikers Brotherhood of Indonesia », un genre de gentil Hell's Angels. Il est très enthousiaste de faire ma connaissance et celui des 2 jeunes indonésiens qui s'avère être le mécano de l'expédition, me répare le relais défectueux en un temps trois mouvements. Pour les remercier de ne pas avoir à nous faire expédier un minuscule relais et d'attendre 1 semaine de plus dans ce paradis perdu, on les invite tous à souper. Ils sont 8 en incluant sa femme Rica et leurs 2 enfants qui voyagent avec eux. Au fil de la soirée, M Leo organise même pour le lendemain l'expédition d'une batterie neuve par un contact à lui à Medan, et nous fourni quelques numéro de téléphones qui pourraient nous être utile en cas de pépin, ou simplement pour nous accueillir tout au long de notre route.
Une petite pause après un bout ardu

C'était le moment de renouer avec la rocambolesque route indonésienne et de nous rendre à Sibolga, sur la côte Ouest. Elle est parfois impeccable et sinueuse comme dans les Alpes, d'autres fois éventrée par l'interminable défilé de poids lourds qui la sillonne frénétiquement. Les innombrables villages qui jalonne le parcours constituent autant de possibilités de voir surgir les chèvres, chiens, vaches, mormons à bicyclette, livreurs de charbon ou de poisson, écolières voilées et insouciantes, c'est une occasion impérative pour nous de pratiquer la « pleine conscience », un question de survie. 

Joyeuse rencontre sur une route intense
Les distances à parcourir chaque jour pour atteindre une ville où on trouvera un hôtel ne sont pas très grandes, mais notre vitesse moyenne de 50 km/h et la chaleur intense nous limite à maximum 300 km par jour. La fin de journée est immanquablement marquée par une bonne averse, voir souvent diluvienne, ce qui rend notre quotidien exténuant.
Nous nous sommes arrêté à Bukittingi 2 jours et 3 nuits après une intense randonnée de 12 heures dont les 3 dernières dans la noirceur sous une pluie battante. Impossible de trouver un endroit où se poser sur les derniers 60 kilomètres.
La baie de Padang sur la côte Ouest de Sumatra

Assez charmant comme petite ville Bukittingi. 2 volcans à proximité et le lac Maninjau dont nous avons fait le tour juste avant de se faire encore surprendre par la grosse averse de fin d'après-midi en rentrant. De Bukittingi jusqu'à Bengkulu c'est plus de 600 kilomètres sur une routes magnifique qui longe l'océan Indien le plus souvent. On a fait étape dans un bled dont on ne se souvient pas du nom, à environ 80 kilomètres de Mukomuko, si ça peut vous situer.
Rizière bucolique tout au long de notre route

Un attroupement spontané

Le simple fait se s'arrêter un moment dans une agglomération à vite fait de créer un petit attroupement autour des motos et une cascade de question par ceux qui connaissent quelques rudiments d'anglais. Tout le monde veut avoir sa photo avec nous et on doit parfois faire preuve d'imagination pour trouver un coin tranquille pour prendre une pause sans se faire photographier par les aborigènes pour leur page facebook. C'est le monde à l'envers!
Après Bengkulu, il nous restait encore plus de 800 km avant d'arriver au port de Bakauheni où il y a le traversier qui nous dépose sur l'île de Java. 

Une petite route fort surprenante
On a dû faire escale à Lahat et encore à Kotabumi avant de parcourir les infernales derniers 200 km de cette route. Le défilé constant de gros camions de tous genres, exhalant d'immenses nuages noirs en peinant à monter à les côtes, suivi par une multitude de véhicules toutes catégories confondues, a fini par nous faire rêver désespérément d'air pur. Ici, aucune règle routière ne s'applique : on dépasse à gauche, à droite, sur l’accotement quand il y en a un, dans le gravier quand il n'y en a pas, deux de large quand le temps et l'espace nous le permettent, tout est permis et le but est de se trouver en avant du peloton.
Transport en commun hyper Hi-tech

Quand on s'est arrêté à Kotabumi, c'est ma Marseillaise qui a eu une rechute du système de charge : décidément notre séjour sur Sumatra s'avère dur pour les systèmes électriques! J'ai mis la batterie sur la charge toute la nuit en espérant que sa tiendrait le coup jusqu'à Jakarta. J'ai débranché le phare pour soulager le système, mais je soupçonne la bobine d'avoir à nouveau souffert de la chaleur.
M Leo nous a mis en contact avec Momon qui nous attendait impatiemment. Il est lui-même un grand aventurier dans son pays, fervent motocycliste (il en a une pareille à celle de Deniz!), il habite avec sa petite famille dans une magnifique et tranquille propriété (fioufff!) dans la banlieue Sud-Est de Jakarta. 

La grande famille de Momon
Nous ayant fourni les coordonnées de sa résidence, nous avons sonné à sa porte après avoir parcouru illégalement les 100 km qui séparent Merak et Jakarta sur l'autoroute à péages, interdite aux motocyclettes. 
Quand la police nous a interpellé, à peine 10 km avant d'arriver à destination, j'ai sorti mon meilleur français pour leur expliquer que c'était la route proposée par le GPS, que nous ne voulions pas nous égarer à Jakarta, que dans tous les autres pays nos grosses motos sont habiletés à circuler sur les voies rapides, bref qu'il était impensable d'envisager un autre itinéraire. Décontenancé par mon « incompréhension » de la langue de Shakespeare et mon charabia francophone, ils nous ont escorté sur 4 ou 5 km avant de nous laisser aller, rassurés par notre conduite.
L'équipe prête à s'élancer dans les flots 

Après sa retraite de Caterpillar, Momon à démarrer une petite entreprise qui offre une formation spécialisée dans la conduite de véhicules tout terrain « hors route ». Leur formation est devenu obligatoire pour circuler sur les chantiers des nombreuses mines d'Indonésie. Il est une source inépuisable d'informations concernant toutes les facettes de la culture indonésienne puisqu'il l'a parcouru dans tous les sens. Momon et sa famille sont d'une infinie générosité, comme des anges tombés du ciel. Malgré toute mon imagination je ne suis arrivé qu'une seule fois à payer quelque chose. Il nous a trimbalé dimanche jusqu'au centre de Java pour y faire une descente de rafting mémorable et prend soin que chacun de nos repas soit une occasion de découvrir une spécialité indonésienne. 
Rizière, encore une autre, mais on ne s'en lasse jamais
On aurait volontiers accepté de rester ici plus longtemps si nous avions plus de temps à notre disposition. On commence à réaliser que deux mois seront loin d'être suffisant pour découvrir l'Indonésie : c'est une année entière qu'il nous faudrait! On y reviendra pour sûr...
La baie de Sibolga

On part demain retrouver M Leo et sa famille dans leur fief à Bandung, à « seulement » 2 ou 3 heures de route de Jakarta. On a pris l'habitude de partir très tôt pour profiter de la fraîcheur du matin et de la circulation un tout petit peu moins intense à cette heure là. Java nous semble bien différente de Sumatra, et paraît-il qu'il en est ainsi de toute l'Indonésie, une palette de cultures aussi nombreuse qu'elle compte d'îles. Ça en fait de la diversité culturelle à découvrir!